L’engagement du G8 contre le viol salué
Londres/Genève, 12 avril 2013. Les États membres du G8 ont adopté hier une Déclaration commune sur la lutte contre les violences sexuelles dans les zones de conflits. Ils affirment dans ce texte que le viol, et tout autre type de violences sexuelles graves, doivent être considérés comme des crimes de guerre et comme des infractions graves aux Conventions de Genève. Cette déclaration est un appel à tous les États pour qu’ils continuent à enquêter et à engager des poursuites lors de violences sexuelles en zones de conflit et ce, où que les crimes aient été commis. Amnesty International UK, REDRESS et TRIAL ont salué cette déclaration historique mais appellent néanmoins les États à adapter leur législation en conséquence et à prendre les mesures nécessaires pour que la déclaration ouvre la voie à une augmentation du nombre de procès d’auteurs présumés.
Tout État est dans l’obligation d’appliquer la compétence universelle en cas d' »infractions graves » aux Conventions de Genève, à savoir lors de crimes de guerre commis dans le cadre de conflits armés internationaux. Par leur Déclaration commune hier, les Etats membres du G8 – Canada, France, Allemagne, Italie, Japon, Russie, Royaume-Uni et États-Unis – soulignent l’obligation de l’ensemble des Etats d’enquêter et d’engager des poursuites contre les individus directement responsables ou les commanditaires de viol ou d’autres actes de violence sexuelle, nonobstant la nationalité du suspect, de la victime, et le territoire sur lequel le crime a été commis.
Un cap important dans la lutte contre l’impunité?
Depuis longtemps déjà, le viol et les autres violences sexuelles aggravées sont considérés comme des infractions graves par le Comité international de la Croix rouge et de nombreuses autres organisations. Mais, la déclaration prononcée par le G8 souligne aujourd’hui une volonté politique nouvelle de ces pays d’agir selon leurs devoirs et de poursuivre désormais en justice les auteurs présumés de violences sexuelles commises dans le cadre de conflits armés internationaux.
Pour Philip Grant, directeur de TRIAL, « cette déclaration représente un engagement politique notable dans le combat ardu pour en finir avec l’impunité des auteurs de violences sexuelles dans les zones de conflits. Cependant, et malgré ce que le droit international prévoit, un nombre insuffisant d’Etats autorisent des poursuites pénales en cas d’infractions graves, lorsque les crimes n’ont pas été commis sur leur territoire. Les défenseurs des droits humains vont dès à présent suivre avec attention si les gouvernements prennent en compte les recommandations du G8 en adaptant concrètement leurs lois et leurs pratiques aux exigences internationales ».
Les trois organisations saluent cette déclaration, qui constitue une reconnaissance par les États de leur responsabilité commune dans la lutte contre l’impunité des auteurs de violences sexuelles en zones de conflits, lesquelles ne doivent pas seulement relever de la compétence des juridictions pénales internationales.
Remédier aux failles
Cette déclaration s’applique uniquement aux violences sexuelles commises dans le cadre de conflits armés internationaux, constitutives de torture, de traitements inhumains ou procédant d’une volonté de causer de grandes souffrances à autrui. Pour les défenseurs des droits humains, si les États font preuve d’une réelle volonté politique, ce projet devrait ouvrir la voie à l’engagement de poursuites par des tribunaux étrangers de nombreuses affaires de viols commis dans le cadre de conflits armés internationaux (Balkans ou RDC, par exemple).
« Cette déclaration ne doit pas être une coquille vide. Les États membres du G8 doivent saisir cette occasion pour renforcer leur engagement dans la lutte contre l’impunité des auteurs de violences sexuelles en zones de conflit, qu’elles soient commises lors de conflits internes ou internationaux et ce, que les victimes soient des hommes, des femmes ou des enfants. Les États doivent eux-mêmes engager des poursuites à l’encontre d’auteurs présumés ou extrader les suspects vers d’autres autorités compétentes « , affirme Kate Allen, directrice d’Amnesty International UK. « La déclaration doit impérativement être suivie d’efforts concrets pour éliminer toute échappatoire pour les auteurs présumés de violences sexuelles commises en zones de conflit. »
Le Royaume-Uni, qui préside cette année le G8, a suggéré que cette démarche s’inscrive dans le cadre de sa propre initiative de lutte contre les violences sexuelles en zones de conflit (Preventing Sexual Violence in Conflict Initiative), lancée en mai 2012 et disposant d’un budget de plusieurs millions de livres. C’est par ce biais qu’a été créé un groupe d’experts en charge, par exemple, de fournir une assistance technique en Bosnie-Herzégovine et à la frontière syrienne lors d’enquêtes et de poursuites pour les violences sexuelles en zones de conflit.
« Cette déclaration est un outil précieux pour l’initiative anglaise lancée à l’échelle internationale pour lutter contre les violences sexuelles dans les zones de conflit », a déclaré Dadimos Haile, directeur ad intérim de REDRESS. « La Grande-Bretagne devra dorénavant remplir ses engagements en matière de poursuites judiciaires envers les auteurs de violences sexuelles, considérées comme des crimes internationaux, présents sur son territoire, où que les crimes aient été commis. Son devoir est également de garantir que les victimes obtiendront une réparation adéquate. «
Amnesty International UK, REDRESS et TRIAL encouragent les États à supprimer tous les obstacles à l’ouverture d’enquêtes et à l’engagement de poursuites concernant l’ensemble des crimes établis par le droit international, notamment les violences sexuelles, et demandent que les États créent des unités spécialisées pour enquêter et poursuivre ce type de crime dans le cadre de procès équitables, à l’issue desquels la peine de mort ne saurait être prononcée.