Révision du Code pénal militaire
Modification du Code pénal militaire Suisse – 19 décembre 2003
- 3/11/03 : L’appel aux Chambres de TRIAL
- 3/11/03 : 1er communiqué de presse de TRIAL
- 8/12/03 : 35 Professeurs de droit signataires de l’appel
- 9/12/03 : 2ème communiqué de presse
- 19/12/03 : adoption de la loi : voir le débat parlementaire
- 19/12/03 : 3ème communiqué de presse : La Suisse va devenir plus attractive pour les criminels de guerre
- Extrait revue de presse(NZZ et autres)
La Suisse va devenir plus attractive pour les criminels de guerre …
Malgré l’appel aux Chambres lancé par TRIAL et la signature de 35 Professeur de droit international qui s’en est suivie, les Chambres fédérales ont formellement adopté, le vendredi 19 décembre 2003, une révision du Code pénal militaire qui rendra la Suisse plus attractive pour les criminels de guerre.
Communiqué de presse du 19 décembre 2003 :
Après le Conseil des Etats en septembre, le Conseil national a accepté lors de la présente session parlementaire de restreindre la possibilité pour la Suisse de juger des criminels de guerre. Alors que le Conseil fédéral proposait au Parlement d’introduire dans le Code pénal militaire l’exigence que l’auteur présumé d’un crime de guerre se trouve en Suisse pour qu’une procédure puisse être ouverte contre lui, le Conseil des Etats a, le 24 septembre 2003, adopté une ligne nettement plus restrictive. Outre la présence en Suisse, un auteur présumé de crimes de guerre ne pourrait être poursuivi que s’il dispose avec la Suisse d’un « lien étroit ». Initialement, le Conseil des Etats entendait ainsi principalement que le suspect dispose en Suisse d’une résidence secondaire.
Le Conseil national s’est rallié le 15 décembre 2003 à cette formulation. Plusieurs intervenants ont toutefois plaidé pour un assouplissement de la définition du lien étroit. Un tel lien doit pouvoir être retenu en cas de visite médicale en Suisse, si le suspect y dispose de liens familiaux ou qu’il y fait des séjours prolongés. Un requérant d’asile serait également considéré comme ayant avec la Suisse un lien étroit, suffisant pour que des poursuites puissent être engagées. En revanche, la possession d’un compte en banque ne suffirait pas, pas plus qu’un passage rapide sur territoire suisse, par exemple en zone de transit d’un aéroport.
Pour TRIAL (Track Impunity Always – Association suisse contre l’impunité), la formulation retenue par les Chambres fédérales constitue un recul dans la lutte contre l’impunité. A titre d’exemple, un officier russe soupçonné d’avoir ordonné des massacres en Tchétchénie ne pourrait pas être arrêté en Suisse s’il vient uniquement pour y rencontrer son banquier. Un génocidaire rwandais pourrait passer ses vacances dans notre pays sans y être inquiété, pourvu qu’il soit dans son intention de repartir rapidement.
Comme 37 professeurs de droit pénal, de droit international et de droit public l’ont souligné en soutenant l’appel aux Chambres fédérales lancé par TRIAL (« La Suisse ne doit pas devenir un havre de paix pour les criminels de guerre »), l’introduction de l’exigence du lien étroit non seulement viole les Conventions de Genève – dont la Suisse est l’Etat dépositaire. Elle est de surcroît incohérente avec les principes du droit pénal suisse en matière de crimes internationaux et avec la partie générale du Code pénal adoptée il y a exactement une année par le Parlement.
TRIAL regrette amèrement ce mauvais signal donné par la Suisse en matière de lutte contre l’impunité des auteurs d’actes particulièrement odieux. La Suisse, à l’avant-garde au plan international, notamment par son soutien à la Cour pénale internationale, dispose aujourd’hui d’une législation en retrait par rapport à de nombreux autres Etats. L’association exprime l’espoir que la condition du lien étroit puisse être abandonnée lors d’une prochaine révision législative. En particulier, un large débat doit être entrepris sur la compatibilité du droit suisse avec les exigences du droit international en matière de lutte contre l’impunité, notamment avec la Statut de Rome de la Cour pénale internationale. TRIAL rappelle que la Suisse ne connaît même pas la notion du crime contre l’humanité, qui n’existe tout simplement pas dans notre ordre juridique. Pour Me Philip Grant, président de TRIAL, « il est grand temps que la Suisse, à l’instar par exemple de l’Allemagne, se dote d’un véritable code des crimes internationaux spécifiquement consacré au génocide, aux crimes contre l’humanité, aux crimes de guerre et à la torture. Ce n’est qu’ainsi que la Suisse pourra jouer un rôle sérieux dans la construction d’un ordre juridique mondial dans lequel les auteurs de crimes internationaux seront implacablement poursuivis ».