Retour en Syrie de Rifaat al-Assad : Un coup dur pour la lutte contre l’impunité
De retour en Syrie, après 36 ans d’exil forcé en France, Rifaat al-Assad échappe à la justice française. L’ancien vice-président syrien, pourtant condamné en appel à Paris le mois dernier à quatre ans de prison pour biens mal acquis, a pu quitter en catimini le territoire français et rentrer à Damas jeudi 7 octobre 2021. Une fuite qui compromet non seulement l’exécution de sa condamnation, mais aussi la procédure ouverte contre lui en Suisse pour crimes de guerre, suite une dénonciation pénale de TRIAL International en 2013.
Longtemps en disgrâce auprès du régime de Damas, Rifaat al-Assad, l’oncle du président syrien Bachar al-Assad, est de retour au pays au lendemain de sa condamnation en France et de la saisie de ses biens dans plusieurs pays européens. Un retour en des terres desquelles il sera difficile de l’en déloger. TRIAL International déplore cette fuite, qui compromet par la même occasion les chances de voir Rifaat al-Assad être auditionné en Suisse par la Procureure en charge de l’enquête. Un renvoi en jugement pour les crimes de guerre dont il est accusé, reste pour sa part une éventualité. Mais l’échappée de celui que l’on surnomme parfois le « Boucher de Hama » pose un risque sécuritaire élevé, notamment pour les personnes ayant témoigné ou participé à cette procédure en Suisse, ainsi que pour les proches des parties plaignantes qui vivent en Syrie et s’exposent à des représailles du régime.
L’organisation regrette particulièrement le manque d’échanges et de collaboration entre la Suisse et la France pour éviter la fuite d’une personne suspectée d’avoir supervisé et participé aux crimes sanglants commis dans la ville de Hama en 1982. Le massacre qui s’y est déroulé a donné lieu à d’innombrables actes de torture et a couté la vie à des dizaines de milliers de personnes – près de 40’000 selon certaines estimations.
Force est de constater que les mailles de la justice laissent encore passer des prévenus soupçonnés des crimes les plus graves, permettant ainsi à un suspect de cette envergure – bénéficiant de moyens financiers importants et de nombreuses relations haut placées – de retourner dans un pays où il est intouchable.
Vingt ans après la création de la Cour pénale internationale, et dix ans après l’adoption en Suisse d’une loi de compétence universelle souhaitée par les autorités, il est tout simplement consternant de constater que Rifaat al-Assad a pu sans difficultés éviter les procédures judiciaires ouvertes contre lui, en France comme en Suisse.
TRIAL international en appelle aux autorités suisses afin que des mesures de protection soient mises en place en faveur des témoins et victimes. L’organisation demande aussi que Rifaat al-Assad soit immédiatement appelé à comparaître en Suisse par l’intermédiaire de son avocat. A défaut de quoi, les autorités de poursuite suisses devraient émettre un mandat d’amener afin de l’entendre, et cas échéant, le renvoyer en procès.
TRIAL International en appelle également aux autorités françaises pour qu’une enquête indépendante soit ouverte pour comprendre les circonstances de la fuite de Rifaat al-Assad, qui s’est déroulée alors même qu’il se trouvait sous contrôle judiciaire en France.