Disparition forcée au sein d’un groupe ethnique marginalisé au Népal
Nandalal Chauhan appartient à la communauté madhesi, marginalisée au Népal. Accusé à tort de nourrir des sympathies envers les maoïstes, il a disparu après avoir été arrêté durant le conflit interne. Son cas constitue non seulement un exemple de la vague de disparitions forcées infligée par les forces étatiques, mais aussi de la rancœur des proches des victimes vis-à-vis des organes de justice transitionnelle népalais.
Nandalal Chauhan a été arrêté en février 2006 à Joganiya Chowk (district de Rupandehi). Un matin, M. Nandalal se rendait en bus dans la ville voisine de Krishnanagar, en Inde. Il accompagnait deux de ses connaissances à Mumbai. Il prévoyait de faire ensuite des achats à Krishnanagar avant de retourner au Népal.
Or il n’est jamais parvenu à destination, puisqu’il a été arrêté à Joganiya Chowk par des membres du Pratikar Samiti (littéralement, « comité de représailles ou de défense »). Ces groupes avaient été créés initialement pour faire face aux attaques de la guérilla maoïste, mais dans certains districts – dont celui de Rupendehi – ils étaient responsables de graves violations des droits humains à l’encontre de présumés maoïstes.
Chauhan a été forcé de descendre du bus et a été battu. Deux responsables de l’armée qui buvaient du thé à proximité se sont enquis de cette agitation, mais en apprenant par le Pratikar Samiti que M. Nandalal Chauhan était prétendument maoïste, ils l’ont eux-même arrêté et emmené dans un camp militaire.
Environ 15 jours après son arrestation, M. Chauhan a été transféré à la prison du district de Taulihawa, d’où il a disparu dans la soirée du 7 avril 2006. Selon les détenus, l’armée s’est rendue à la prison ce jour-là et a emmené deux prisonniers avec eux, dont M. Chauhan. Le sort de M. Chauhan et l’endroit où il se trouve demeurent inconnus depuis lors.
La confiance dans les mécanismes nationaux disparait
Entre 2006 et 2016, la famille du disparu – et en particulier son frère, Mithailal Chauhan – a attendu la formation de la Commission vérité et réconciliation (CVR) au Népal. Mithailal Chauhan pensait que, ayant reçu une aide provisoire du gouvernement et une bourse pour les enfants de son frère, les autorités avaient reconnu la disparition forcée de son frère. Il avait l’espoir que, une fois établie, la CVR révélerait la vérité sur le sort de Nandalal et sur l’endroit où il se trouvait, qu’elle demanderait des comptes aux responsables et qu’elle offrirait à la famille une réparation adéquate.
Cependant, rien de concret ne s’est produit depuis le dépôt de leur plainte, en 2016. Par la suite, M. Chauhan a perdu confiance dans la CVR. Avec l’aide de TRIAL International et du Human Rights and Justice Centre à Katmandou, il a donc porté son cas devant le Groupe de travail des Nations Unies sur les disparitions forcées ou involontaires (GTDFI).
L’affaire a été soumise le 18 décembre 2020 au GTDFI et est actuellement en cours.
Contexte
Cette affaire est emblématique des disparitions forcées qui ont eu lieu pendant le conflit armé interne au Népal entre 1996 et 2006. En 2003 et 2004, le Népal a été le pays où le GTDFI a signalé le plus grand nombre de disparitions forcées dans le monde. À ce jour, plus de 1’300 personnes disparues pendant le conflit, telles que M. Nandalal Chauhan, sont toujours introuvables.
Cet article a été produit avec le soutien financier de l’Union européenne. Son contenu est la seule responsabilité des auteurs et ne reflète pas nécessairement les positions de l’Union européenne.