Une victime nigériane témoigne devant la Commission vérité gambienne
Un Nigérian dont le frère faisait partie des quelques 59 migrants ouest-africains tués en Gambie en 2005 par une unité paramilitaire contrôlée par le président Yahya Jammeh a témoigné devant la Commission vérité, réconciliation et réparation (TRRC) de Gambie le 2 mars 2021. Des groupes de défense des droits humains gambiens et internationaux suivent les audiences de la commission, qui ont débuté en janvier 2019.
Kehinde Enagameh a déclaré que son frère, Paul Omozemoje Enagameh, alors âgé de 28 ans, avait été porté disparu en 2005 alors qu’il cherchait à émigrer en Europe. Kehinde Enagameh a appris plus tard par un ami que les autorités gambiennes avaient arrêté et tué son frère. Mais pendant de nombreuses années, il n’a pas pu en savoir plus, jusqu’à ce que le meurtre des migrants attire l’attention de la communauté internationale ces dernières années.
Voir le témoignage de Kehinde Enagameh devant la TRRC (en anglais)
« Depuis que mon frère a disparu, toute ma famille a vécu un traumatisme émotionnel », a déclaré Kehinde Enagameh. « Je veux que Yahya Jammeh et les personnes impliquées dans le meurtre de mon frère soient traduits en justice ».
Paul Enagameh était l’un des neuf Nigérians tués lors du massacre, selon un rapport de 2008 publié par la Nigerian High Commission en Gambie. La plupart des autres victimes nigérianes n’ont pas pu être identifiées.
Outre les Nigérians, environ 44 Ghanéens et des ressortissants du Congo, de la Côte d’Ivoire, de la Gambie, du Liberia, du Sénégal, de la Sierra Leone et du Togo auraient été tués en quelques jours en juillet 2005. Le 25 février 2021, un ancien officier de haut rang de l’Agence nationale de renseignement de Gambie, a présenté à la TRRC une liste de 51 migrants qui avaient été arrêtés – la première de ce type. Cette liste, qui comprend un Nigérian du nom de John Amase, a apparemment été établie après que huit autres migrants, dont plusieurs Nigérians, aient déjà été tués.
La TRRC a également entendu des témoignages selon lesquels l’ancien président Jammeh avait participé au viol et à l’agression sexuelle de plusieurs femmes, forcé des Gambiens séropositifs à renoncer à leurs médicaments et à se confier à ses soins personnels, et ordonné le meurtre et la torture d’opposants politiques ainsi que des « chasses aux sorcières » au cours desquelles des centaines de femmes ont été détenues arbitrairement.
Selon les groupes de défense des droits humains, ces audiences soulignent la nécessité d’une enquête criminelle et de poursuites appropriées à l’encontre de Yahya Jammeh et des autres personnes qui portent la plus grande responsabilité dans les crimes graves commis par son gouvernement. L’ancien président vit en exil en Guinée équatoriale depuis son départ de Gambie en janvier 2017.
« Nous allons localiser la famille de John Amase, dont l’identité vient d’être révélée pour la première fois à la TRRC, et nous allons rechercher l’identité des sept migrants nigérians restants », a déclaré Femi Falana, avocat principal du Nigeria, qui représente la famille Enagameh. « Yahya Jammeh s’est peut-être réfugié en Guinée équatoriale pour l’instant, mais tôt ou tard, il devra faire face à ces accusations . »
Cet article a été produit avec le soutien financier de l’Union européenne. Son contenu est la seule responsabilité des auteurs et ne reflète pas nécessairement les positions de l’Union européenne.