Graves tortures infligées à M. Nouar Abdelmalek en 2001 et 2005
Introduction
En juillet 2009, TRIAL a introduit une communication individuelle contre l’Algérie devant le Comité contre la torture des Nations unies, pour le compte de M. Nouar Abdelmalek.
M. Nouar Abdelmalek est entré dans l’armée algérienne en 1990. Dans le contexte des violences généralisées qui ont fait rage en Algérie pendant les années 90, il a refusé d’obtempérer à des missions qui heurtaient sa conscience et a été sanctionné.
En avril 2001, M. Abdelmalek a été arrêté à la frontière algéro-tunisienne alors qu’il tentait de quitter son pays, craignant pour sa sécurité. Détenu en secret durant 15 jours à Constantine dans des conditions inhumaines, il a subi des tortures d’une extrême gravité de la part d’agents du DRS. Il a dû signer des documents dont il ignorait la teneur. A la suite de ces sévices, il a été hospitalisé durant un mois.
En 2005, M. Abdelmalek a de nouveau été arrêté. Il a été accusé de complot contre un Ministre d’Etat et de terrorisme, et très gravement torturé durant plusieurs jours par des agents de l’Etat. M. Abdelmalek a été battu dans l’enceinte même du Tribunal de Bir Mourad Raïs, juste avant sa comparution devant un juge. Les déclarations qui lui avaient été extorquées sous la contrainte ont été utilisées dans la procédure menée contre lui. Placé en détention à la prison de El-Harrach, il a de nouveau subi des sévices dans l’infirmerie de la prison, le 12 octobre 2005, et dans un lieu secret de détention, le 23 octobre 2005. Il a été placé en cellule d’isolement durant 7 mois.
M. Abdelmalek conserve des séquelles irréversibles de ces tortures.
M. Abdelmalek a systématiquement dénoncé les tortures subies devant chaque autorité judiciaire à laquelle il a été présenté, mais en vain. Menacé, il a été contraint de fuir son pays et de solliciter l’asile dans un pays tiers, où le statut de réfugié lui a été accordé.
Il se trouve désormais confronté à l’impossibilité légale de recourir à une action judiciaire pour la plupart des tortures qu’il a subies du fait de la promulgation de l’Ordonnance n° 6/01 portant mise en oeuvre de la Charte pour la paix et la réconciliation nationale qui interdit tout recours en justice contre les membres des services de sécurité algériens.
L’auteur demande au Comité de reconnaître qu’il a été victime de tortures au sens de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, et que l’Algérie a enfreint les articles 2 par. 1, 6, 7, 11, 12, 13, 14 et 15 de la Convention, ainsi que, subsidiairement, l’article 16.
L’auteur demande également au Comité d’enjoindre à l’Algérie d’entreprendre une enquête approfondie, de traduire en justice les responsables et de lui offrir une réparation appropriée.
La procédure est en cours devant le Comité contre la torture.
La décision
En mai 2014, le Comité contre la torture a publié sa décision concernant le cas deNouar Abdelmalek.
Selon le Comité, l’Algérie a violé différents articles de la Convention contre la torture(art.1, 2 § 1 lu conjointement avec l’article 1, 11, 12 13, 14 et 15).
Le Comité a également constaté « l’absence plus d’une décennie après les faits d’une quelconque enquête sur les actes de torture maintes fois dénoncés par le requérant ».
Par ailleurs, le Comité a relevé l’absence de collaboration de l’Algérie, regrettant que l’Etat partie n’ait donné aucune information substantielle sur la recevabilité et le fond de la requête.
Selon l’article 22 de la Convention contre la torture, les Etats parties ont l’obligation d’informer le Comité des cas et mesures éventuelles prises afin de remédier à la situation.
Le Comité demande à l’Algérie d’initier une enquête impartiale sur les événements en question afin de punir les responsables du traitement infligé à Nouar Abdelmalek.
L’Etat algérien dispose maintenant d’un délai de 90 jours pour informer le Comité des mesures prises, y compris l’indemnisation de la victime.