Au Mexique, les mineurs aussi souffrent des disparitions forcées
Que le Mexique soit aux prises d’une grave crise des droits humains est de notoriété publique. Mais un groupe de victimes est encore trop souvent ignoré : les enfants. Aujourd’hui, TRIAL International et une coalition d’ONG locales dénoncent leur situation au Groupe de travail sur les disparitions forcée ou involontaires (GTDFI).
Plus de 5 500 enfants et adolescents âgés de 0 à 17 ans ont été victimes de disparitions forcées au Mexique depuis 2006. Ils représentent 18% du nombre officiel de disparus. Un pourcentage impressionnant, mais qui pourrait être encore bien en-deçà de la réalité.
Ce chiffre couvre des situations très variées : les migrants mineurs qui transitent par le Mexique pour rejoindre les Etats-Unis ; et les disparitions commises par les acteurs étatiques comme non-étatiques. « Mais même quand les acteurs non-étatiques sont responsables, on ne peut jamais exclure une implication directe ou indirecte des agents de l’Etat qui jouissent d’une impunité quasi-totale », pondère Gabriella Citroni, Conseillère juridique principale chez TRIAL International et experte sur les disparitions forcées.
Au-delà des milliers de victimes directes, d’innombrables autres mineurs sont des victimes secondaires des disparitions forcées. En effet, ceux dont les proches ont été disparus voient leur quotidien gravement et durablement affecté.
Des besoins spécifiques qui appellent des mesures différenciées
Les droits fondamentaux des mineurs dont les proches sont disparus sont souvent violés. Quand ces personnes disparues assuraient la subsistance de la famille, les mineurs se voient souvent obligés de les remplacer : ils abandonnent alors l’école pour trouver du travail. Leurs droits d’accéder à l’éducation, mais aussi à la santé, à la sécurité sociale et à la propriété sont donc impactés.
Plus de la moitié des victimes mineurs (59%) sont des filles. Des rôles de genre, ancrés dans l’histoire et la tradition, les exposent davantage que les garçons. Elles sont donc nombreuses à quitter l’école pour assumer des responsabilités parentales. Leur vulnérabilité appelle des mesures spécifiques, or les politiques actuelles du Mexique n’incluent aucune composante de genre.
Pour éviter toute forme de re-victimisation, le Mexique doit garantir aux mineurs un accès rapide et complet à des réparations et à une assistance sociale. Ces réparations doivent inclure l’accès la santé, à l’alimentation et à l’éducation, pour éviter que la subsistance des familles repose sur les épaules de ces mineurs. Ces derniers sont également exposés à l’isolement social et à des souffrances psychologiques : le soutien psycho-social est donc également essentiel.
Des politiques insuffisantes et inopérantes
Aujourd’hui, le Mexique ne dispose d’aucune politique publique qui protège efficacement les mineurs victimes de disparitions forcées. Deux programmes d’alerte et de recherche existent, mais ils sont rarement utilisés et leur activation est trop complexe.
« Par exemple, l’alerte ne peut être activée que si un risque grave et imminent lié à la disparition de l’enfant peut être prouvé », explique Gabriella Citroni. « Les autorités considèrent souvent que ce critère n’est pas rempli, sans tenir compte de la violence généralisée dans le pays. »
Dans leur rapport au Groupe de travail contre les disparitions forcées ou involontaires (GTDFI), TRIAL International et ses partenaires recommandent notamment la simplification de ces procédures, pour que les recherches des disparus puissent être lancées le plus rapidement possible.
Lire le résumé exécutif (en anglais)
Lire le rapport au GTDFI (en espagnol)
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