Contexte

Bien que la guerre civile ait pris fin en 2006, les crimes de masse sont toujours une réalité au Burundi – particulièrement depuis la crise politique de 2015. Les faiblesses du système judiciaire, le climat d’impunité et la crainte de représailles sont les principaux obstacles qui empêchent l’accès des victimes à leurs droits. De 2011 à 2023, date de la fin de son programme dans le pays, TRIAL International a soutenu les victimes de graves violations des droits humains dans leur quête de justice.

Depuis son indépendance en 1962, le Burundi a connu plusieurs coups d’État et de violents affrontements entre la majorité hutu et la minorité tutsi. L’assassinat du premier président démocratiquement élu, Melchior Ndadaye, en 1993, a déclenché une guerre civile qui a duré jusqu’en 2006 et coûté la vie à 300’000 civils.

En 2000, un cessez-le-feu avait été signé entre le gouvernement et les principaux groupes rebelles. Malheureusement, le refus de deux factions hutu de respecter le processus de paix a entraîné une escalade de la violence. En 2006, le dernier groupe rebelle actif – les Forces Nationales de Libération, ou FNL – a signé un accord avec le gouvernement, mettant ainsi officiellement fin à la guerre civile au Burundi.

En 2015, le pays a sombré dans un nouveau cycle de violence lorsque le président Pierre Nkurunziza a refusé de céder le pouvoir. Depuis lors, le parti au pouvoir a imposé une véritable répression contre les médias indépendants, les militant·e·s, les opposant·e·s politiques et les défenseur·euse·s des droits humains. La vie quotidienne des burundais reste teintée de détresse et de crainte. Cette « crise normalisée » a conduit les Nations Unies à établir une Commission d’enquête qui, depuis 2016, documente les violations massives des droits humains dans ce pays. La Cour pénale internationale a également ouvert une enquête en 2017.

Lutter contre l’impunité

Jusqu’en 2016, le personnel de TRIAL International était autorisé à entrer dans le pays et était en liaison directe avec les victimes. Suite à l’expulsion de sa représentante, l’organisation a été contrainte de mener son travail depuis l’extérieur du territoire, notamment par le biais de sa stratégie régionale dans les Grands Lacs.

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Depuis 2015, les Burundais vivent dans un était de « crise normalisée » ©Phil Moore

Rendre justice aux victimes

Le système juridique burundais n’apporte pas encore de réponse efficace pour punir les violations des droits humains passées et présentes, ni pour prévenir celles qui pourraient se produire. Par conséquent, TRIAL International a porté la majorité de ses affaires au niveau supranational – principalement devant le Comité contre la torture des Nations Unies, la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples et les groupes de travail des Nations Unies.

Toute assistance était gratuite pour les victimes et TRIAL International ne faisait aucune discrimination fondée sur l’origine, l’appartenance ethnique, la langue, la religion ou le genre.

 

Documenter les abus

Bien que TRIAL International ne soit pas en mesure de se rendre au Burundi, l’organisation continuait de suivre la situation et de documenter les violations qui y sont perpétrées. Elle contribuait ainsi à faire entendre la voix des victimes sur la scène internationale et à maintenir la crise burundaise à l’agenda international.

En 2017, TRIAL International a mené une mission d’enquête auprès des populations réfugiées en dehors du Burundi, centrée spécifiquement sur les violences sexuelles. Ses conclusions ont été transmises aux instances et mécanismes internationaux qui suivent la situation dans le pays.

Si la situation actuelle ne permet pas la poursuite des responsables des exactions de masse, ces violations doivent malgré tout être rigoureusement documentées. Cette documentation est le seul moyen de s’assurer que ces actes seront un jour punis, au niveau national ou international.

Renforcement des capacités locales

TRIAL International offrait une large gamme de formations pour les avocat·e·s de la région. Les sujets abordés comprennent la documentation des crimes de violences sexuelles, la saisine d’organismes internationaux ou l’invocation de traités internationaux dans les procédures nationales.

Avant 2016, TRIAL International assurait elle-même la formation des avocat·e·s au Burundi. Mais face à l’isolement croissant du pays, l’autonomisation des acteurs locaux est devenue une priorité. C’est pourquoi des avocat·e·s burundais·e·s formés dans le passé étaient devenu·e·s formateur·ice·s auprès de leurs pairs. En outre, des formations régionales transfrontalières étaient organisées depuis le bureau de TRIAL International à Bukavu, en RDC.

 

Clôture du programme de TRIAL International au Burundi

A la fin de l’année 2023, TRIAL International a conclu son programme au Burundi, après avoir exploré de multiples approches juridiques et de renforcement des capacités après plus de dix ans. Les efforts exhaustifs déployés depuis 2011 ont permis de reconnaître que les voies judiciaires disponibles pour une action percutante avaient été pleinement explorées et que les avocat·e·s et défenseur·euse·s des droits humains burundais·e·s – formé·e·s et encadré·e·s par l’organisation au fil des ans – étaient capables de poursuivre le travail.

Malgré la clôture du programme, TRIAL International reste déterminé à honorer les engagements pris avec les victimes et leurs familles, en prolongeant son soutien pour les affaires en cours bien au-delà de 2023.  Cet engagement englobe les affaires pendantes devant les tribunaux nationaux et les mécanismes internationaux et régionaux de protection des droits humains, en particulier le Comité des Nations unies contre la torture et la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples.