Toutes les parties ont été entendues: Résumé des débats de la troisième semaine du procès d’Ousman Sonko

26.01.2024

(22-24 janvier 2024, Tribunal pénal fédéral, Bellinzone, Suisse)

Federal Criminal Court in Bellinzona
© TRIAL International / le Tribunal pénal fédéral à Bellinzone, Suisse.

Examen des charges de mars 2006 relatives à la persécution de journalistes

(actes de torture, séquestration et violences sexuelles commises en tant que crimes contre l’humanité)

Dans le cadre d’une tentative de coup d’État en mars 2006, Ousman Sonko est accusé, en tant que complice d’un groupe d’auteurs, d’avoir torturé diverses personnes, dont des membres de l’armée, des hommes politiques et des journalistes, de les avoir illégalement privées de liberté, ainsi que d’avoir commis un viol à Banjul, en Gambie.

 

18 et 22 janvier 2024 – Jours 9 et 11

Le plaignant appelé à témoigner est un journaliste gambien depuis les années 1990. Dans les années 2000, il occupait un poste de direction au sein du The Independent. En mars 2006, ce journal national de renommée a publié plusieurs articles sur la tentative de coup d’État contre le gouvernement de Yahya Jammeh.

Le plaignant se souvient avoir été arrêté à la fin du mois de mars 2006. Sans explication sur les raisons de son arrestation, il a été transféré au siège de la National Intelligence Agency (NIA), où il a dû endurer de terribles actes de torture de la part des Junglers. À une occasion, il y a rencontré Ousman Sonko et du personnel de la NIA.

Lors de sa libération sous caution fin avril 2006, il a dû se rendre dans plusieurs hôpitaux, mais les médecins lui ont refusé des soins par peur, car il était évident qu’il avait été torturé. Il s’est donc réfugié au Sénégal avec sa femme enceinte. Il a subi de graves traumatismes physiques et psychologiques à cause de ce qu’il a vécu. Toute sa famille est traumatisée, y compris son fils.

A The Independent, tout le monde était persécuté, la question n’était pas de savoir si quelqu’un allait être arrêté mais quand. Selon le plaignant, la torture et la tyrannie ont commencé avec le régime de Jammeh.

 

23 janvier 2024 – Jour 12

Le plaignant appelé à témoigner est un journaliste gambien depuis les années 1990. En 2006, il occupait un poste à responsabilité au sein du journal national de renommée The Independent ainsi qu’au sein de l’Union de la presse gambienne (GPU). Il a été arrêté à la fin du mois de mars 2006, après que le journal ait publié plusieurs articles critiques sur la tentative de coup d’État contre Yahya Jammeh. En 2017 et 2022, il a été élu parlementaire pour le parti UDP.

Les policiers qui l’ont arrêté sur son lieu de travail l’ont d’abord conduit au siège de l’Unité d’intervention de la police, où il a vu plusieurs de ses collègues. Il a ensuite été conduit à l’Agence nationale de renseignement, où il a été détenu pendant plusieurs semaines et interrogé sur les articles qu’il avait écrits. Il a souffert de blessures physiques et de traumatismes psychologiques dus à la violence qu’il a subie.

À un moment donné, il a été présenté à un panel, dont faisait partie Ousman Sonko, alors inspecteur général de la police (IGP). On lui a expliqué qu’il avait été pris pour cible en tant que journaliste, et plus particulièrement en tant que journaliste travaillant pour ce journal.

À l’époque, la situation politique était terrible. Selon le plaignant, la Gambie a connu l’enfer entre 1994 et 2016 : Jammeh était un tyran, la justice était sélective et injuste, le parlement n’était pas libre.

 

Fait marquant de la procédure

Lors de la reprise de l’audience le 23 janvier 2024, la défense a déposé une déclaration écrite sous serment de l’ancienne épouse d’Ousman Sonko, datée du 22 janvier 2024. Selon la défense, ce document met en évidence la personnalité de l’accusé, en particulier en privé.

Le procureur a fait valoir que ce document n’était pas pertinent pour la défense, mais qu’il ne s’opposerait pas à l’inclure dans le dossier s’il était important pour l’accusé.

Les plaignant·e·s s’en remettent à la Cour pour l’admission de ce document dans la procédure, tout en soulignant qu’il n’a aucune signification dans la pratique juridique suisse et que son audition en tant que témoin n’est ni nécessaire ni recommandée étant donné sa proximité avec l’accusé et l’équipe de la défense et le fait qu’elle ait assisté au procès.

La Cour a accepté le document dans le dossier.

 

Interrogatoire d’Ousman Sonko sur l’examen des charges de mars 2006

(actes de torture, séquestration et violences sexuelles commis en tant que crimes contre l’humanité)

23 janvier 2024 – Jour 12

Ousman Sonko a été appelé à témoigner et confronté aux résultats de l’enquête ainsi qu’aux déclarations supplémentaires des plaignant·e·s faites devant la Cour, en ce qui concerne les charges susmentionnées.

L’accusé a expliqué que la police gambienne était une force respectée. Il a répété qu’il n’avait que des fonctions non opérationnelles en tant qu’Inspecteur général de la police (IGP) et que l’Agence nationale de renseignement (NIA) n’a jamais été sous son contrôle. Tous les groupes d’enquête ont été mis en place sous l’égide de la NIA et sur ordre de Yahya Jammeh. Il a contesté les conclusions de la TRRC qui affirment qu’il était responsable, en tant qu’IGP, de la torture de personnes prétendument impliquées dans la tentative de coup d’État.

Entre autres déclarations, l’accusé a affirmé que, le 21 mars 2006, il était membre du groupe d’enquête pour la première fois, uniquement en tant qu’observateur, alors que les interrogatoires avaient déjà commencé. Il s’y est rendu une ou deux fois. Sa présence était requise pour libérer des personnes, s’excuser de leur arrestation et de leur détention. Il n’avait pas connaissance d’actes de torture et il n’était pas en son pouvoir de les empêcher.

 

23-24 janvier 2024 – Jours 12-13 : Demandes de preuves, décision de procédure et suspension du procès jusqu’en mars 2024

Le 23 janvier 2024 a marqué la fin des auditions de toutes les parties. Conformément au code de procédure, les parties ont alors eu la possibilité de demander des preuves supplémentaires.

Le Procureur et les plaignant·e·s ont rappelé que plusieurs personnes pouvaient encore être entendues pour prouver l’existence d’un système de répression en Gambie dans les années 2000, et que les dossiers de deux affaires gambiennes récentes dans d’autres pays pouvaient être ajoutés comme preuves.

La défense a critiqué le soutien de TRIAL International aux plaignant·e·s ainsi que l’indépendance des avocat·e·s vis-à-vis de l’organisation.

 

Le 24 janvier 2024, les parties ont été invitées à répondre.

Les arguments de la défense à l’encontre de TRIAL International ont été considérés comme des tactiques de diversion, et elle a donc retiré sa demande.

La Cour a accepté certains éléments de preuve dans le dossier.

Cependant, les auditions de témoins supplémentaires ont été rejetées. La cour a également refusé d’inclure les documents provenant d’autres affaires et a rejeté toutes les demandes de la défense.

La Cour a informé les parties que la phase de présentation de preuves est close et que les plaidoiries finales auront lieu pendant la semaine de réserve du 4 au 8 mars 2024. (date sujette à modification)

 

>> Ce résumé de la troisième semaine du procès d’Ousman Sonko reprend les points les plus importants abordés au cours des audiences. TRIAL International s’efforce de résumer le plus fidèlement possible ce qui a été dit. L’organisation ne peut être tenue responsable d’éventuelles erreurs ou omissions. <<

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